En 1961, le commando des Bretons,
composé de militants contre la guerre d’Algérie engagés contre leurs grés, est
envoyé dans le massif des Aurès. Conditionnés psychologiquement par leur
lieutenant, ils vont devoir tuer, y prendre
du plaisir, violer : faire la guerre. Parmi eux, un seul résistera, Noël
refusera de tirer. En 1972, René Vautier raconte leur histoire dans un
simili-documentaire coup de poing : Avoir 20 ans dans les Aurès.
Ce film est un témoignage
important d’une guerre de décolonisation dont les conséquences se font encore
sentir, tant sur le plan national que géopolitique. A sa sortie, en 1972, il
brise un tabou en exposant les agissements de l’armée française sur ses propre soldats dans ce
conflit sans vainqueur.
Aujourd'hui encore, La France n’a
pas fini de panser les plaies de la décolonisation. Tandis que certains
réclament l’intégration du rôle positif de la France durant les colonies dans les programmes scolaires, il
serait bon de montrer aux élèves de France et d’Algérie des films comme Avoir 20 ans dans les Aurès ou La Bataille d’Alger (de Gillo Pontecorvo).
Cela éviterai peut-être que l'on ne donne tant de crédit à des discours démagogue et haineux basés sur la méconnaissance d'une Histoire de moins en moins connue.
Ces films sont humains et
relativement impartiaux – en cela qu’ils évitent l’écueil de la victimisation d’un
camp et exposent les cheminements qui ont menés aux bonnes et aux mauvaises
décisions. Ils dénoncent les tortures psychologiques et physiques commises
durant ce conflit.
Les deux œuvres prennent la forme
de documentaires joués. Quoi que la mise en scène soit mieux gérer dans La Bataille d’Alger (avec peu de moyens,
il est plus simple de tourner des scènes de ville que des scènes de champs de
batailles), les deux sont soutenus par d’excellents acteurs et une volonté
sérieuse de bien faire.
Là où Pontecorvo s’attache à
montrer l’engrenage qui a mené au conflit et les dérives dans les deux camps,
Vautier dénonce les méthodes de l’Etat-major pour forcer la main des appelés
afin qu’ils deviennent des machines à tuer. C’est un voyage initiatique vers la
barbarie, tel un Full Metal Jacket
(1987).
Pour briser le pacifisme initial
du commando, le lieutenant les envoie volontairement dans une embuscade. Il attisera
ensuite leur désir de vengeance et leur unité en se gardant d’être trop
autoritaire. Quant à Noël – celui qui refuse de tuer – il le poussera à la
désertion, puis, se servira de sa mort pour susciter définitivement la haine
des algériens chez ses recrues.
Le processus est vicieux et implacable, il rappel que même avec les meilleures intentions, une fois le doigt
dans l’engrenage militaire, on ne sait pas quelle sera sa réaction.
Avoir 20 ans dans les Aurès est une
dénonciation de l’absurdité de la guerre, servi par une équipe sans faille
(mention spéciale pour Philippe Léotard dans le rôle du lieutenant sadique) et appuyé par une bande son mémorable. C’est un témoignage sur l'issu fatale de la colonisation. Ce grand film fait partie de notre Histoire – qu’on le
veuille ou non.
Pala