Le présent vient du passé |
Le punk n’est jamais mort. Ceux qui en veulent la preuve n’ont qu’à se rendre à Berlin, dans le quartier de Friedrichshain. Là, entre les clubs touristiques et les bastions de l’underground, ils trouveront parmi les derniers squats autogérés d’Europe de l’Ouest luttant pour leur survie.
Cependant, le tournant du nouveau millénaire avait
majoritairement relégué la culture punk à un
objet marketing bien sage pour adolescents en mal de sensations. Ecrasé,
l’ex-courant libertaire vendait des
meubles et du
parfum pour les grandes enseignes. Ses derniers rejetons occupaient plus la
presse
people que les pages débats des grands quotidiens. C’est que l’époque était
au triomphe de la société de consommation et les vaincus, punks, mais aussi
hippies et autres chantres de la décroissance étaient moqués, bouffons au
cirque de l’Argent.
La révolution au salon |
Puis vint 2008. Progressivement le monde occidental s’enfonça
dans la crise. Les géants politiques perdirent pieds, se retrouvant à genoux face
aux économistes. Le reste de la planète se mit à railler la grande Amérique et
ses alliés européens. Les écarts de
richesses éclatèrent au grand jour et se creusèrent tandis que la précarité
gangrénait les pays. On vit fleurir des mouvements prônant un changement de
modèle globale : Indignés,
Occupy,
les idées se rependirent lentement dans toute la société, pour le meilleur et pour le
pire. Nous prenions conscience de l’urgence du changement.
Comme il est d’usage lorsqu’on veut changer, on regarde
notre passé… Avant, il y a eu la beat generation et les hippies, ils furent les
premiers repris dans les discours puis par les standards de la Mode, en
musique, en
vêtement... Mais Ces derniers étaient incompatibles avec la société
actuelle car fondé sur l’espoir offert par une société roulant vers son âge
d’or. Alors, il fallut regarder du côté des cultures post-73 :
punk, grunge, hip-hop, reggae…
Les ados qui avaient grandi avec ces contrecultures étaient
désormais des consommateurs en pleine possession de leur budget. Chaque
mouvement était réutilisable par la Mode et au-delà, par la société politique. Ainsi,
la culture punk avait une idéologie
sociopolitique finalement proche du mouvement libérale
dominant – donc, facilement appréhendable : mélange de pensées libertaire,
de pessimisme et de fonctionnement en autogestion, le punk avait œuvré, dans
son temps, à l’émergence de nombreux labels
et salles spectacles
indépendants des majors. Cette idée d’indépendance – d’auto-entreprenariat –
était encrée dans l’esprit de la nouvelle génération par le discours
gouvernemental qui y voyait la solution pour « boosté l’économie ».
Les labels
et les artistes autoproduits fleurirent donc, aidés par internet et les
possibilités de financement
participatif (pub au passage).
L’assimilation peut désormais se faire dans les médias
pseudo-jeunes, qui commencent à s’interroger sur le retour du punk. Le punk
intellectuel renait, récupéré, systémisé, mais sérieux, affranchi des moqueries :
la bête sauvage a connu l’emprisonnement et l’humiliation du cirque, elle peut
maintenant brillée comme animal domestique, aimé de tous.
Le punk n’est jamais mort, non, il s’est assagit et les
derniers spécimens sauvages sont observables dans leurs réserves, à Berlin ou ailleurs.
Pala